Une fouille menée au printemps 2013 au lieu-dit Naegelberg, commune d’Illfurth (Haut-Rhin) a permis de documenter des inhumations du Néolithique récent (vers 3800 av. J.-C.), un bâtiment d’époque romaine (Bas Empire) aménagé sur une terrasse creusée dans la pente, associé à un puits, des fours et des foyers contemporains, ainsi que les positions allemandes d’arrière-front de la Grande Guerre 1914-1918 (fig. 1).
La première inhumation en fosse de plan circulaire, datées du Néolithique récent (vers 3800 av. J.-C.), a été découverte lors du diagnostic, la seconde lors de la fouille. Cette dernière associe deux enfants déposés sur le fond d’une fosse circulaire, dont la fonction première n’était pas funéraire ; c’est-à-dire qu’elle n’a pas été creusée dans le but d’y déposer des morts mais réutilisée pour une fonction d’inhumation. Selon l’étude anthropologique, le sujet principal a été soigneusement déposé sur le côté, les jambes repliées, tandis qu’un accompagnant a été déposé par-dessus le premier, sur le ventre, d’une façon qui semble moins soignée. Il faut signaler que les sépultures d’accompagnements dont le sujet principal est un enfant sont exceptionnelles dans l’état actuel des connaissances.
Le site est réoccupé à l’époque romaine, au cours des premiers siècles de notre ère. Les vestiges ont été mis au jour principalement au nord-est de la fenêtre nord de la fouille (fig. 2), seul un puits se trouve isolé dans la partie sud. Le mobilier céramique révèle deux phases d’occupation : la première débute à la charnière des Ier et IIe siècles et la seconde au second tiers du IIIe siècle pour s’achever courant du IVe siècle. On suppose qu’un établissement de type villa encore inédit se trouvait à proximité de l’emprise de la fouille, la pars urbana serait attestée par le remploi de quatre fragments de plaques de marbre (1,5 kg au total) dans une sablière basse. Après un apparent hiatus, à la fin du Haut-Empire, un habitat peut-être plus modeste aurait été implanté sur une terrasse aménagée sur le versant et uniquement construit en matériaux légers (bois et torchis). Le bâtiment aurait fonctionné avec quelques structures annexes de type foyer ou fumoir (fig. 3). Le mobilier céramique mis au jour dans la couche scellant les vestiges de cet habitat confirme l’attribution de cet ensemble à un habitat, la majeure partie des récipients faisant partie de la batterie de cuisine locale de tradition indigène chère aux Rauraques.
Les investigations ont permis d’ouvrir une fenêtre sur des aspects plus récents de l’occupation du site. Un réseau d’abris enterrés et de tranchées appartenant à la première ligne de la seconde position de défense du système allemand de la première guerre mondiale a ainsi été décrit (fig. 4), ainsi que deux trous d’obus a priori français. Enfin, les vestiges d’un vignoble implanté sur le versant nous rappellent la place que tenait auparavant la viticulture dans l’économie du Sundgau, avant que la crise du phylloxera n’achève son déclin commencé au cours du XIXe siècle.