L’opération menée à Illfurth au lieu-dit Hasenrain de janvier à février 2016 a permis de mettre au jour la suite de la nécropole mérovingienne déjà fouillée en 2005 (Roth-Zehner et al. 2007) et en 2015 (Mauduit 2016). Cette fouille a été motivée par la construction d’une maison individuelle située dans le prolongement méridionale du lotissement du Buergelen. Localisée à l’ouest de la voierie, la parcelle de 700 m² a livré 30 sépultures supplémentaires et 3 enclos, ce qui porte à 250 le nombre d’individus inhumés à Illfurth, ainsi qu’une occupation hallstatienne, localisée dans l’angle sud-ouest de l’emprise.
L’étude post-fouille est actuellement en cours, les résultats exposés ici sont donc préliminaires.
Les deux fouilles réalisées successivement sur les parcelles situées au sud de la fouille de 2005 ont permis confirmer que :
Parmi les 30 sépultures fouillées en 2016, seules 10 étaient intactes, les autres ont toutes subies un pillage. Les datations obtenues par le mobilier, comprises entre le 1er tiers du VIème siècle et la fin du VIIème siècle, confirment celles déjà proposées lors de la fouille de 2005. On notera toutefois que la durée d’utilisation de l’ensemble funéraire d’Illfurth se poursuit bien au-delà de la fin du VIIème siècle, fait qui a pu être conforté grâce à la réalisation de datations radiocarbones, effectuées dans le cadre du PCR « Espaces et pratiques funéraires en Alsace aux époques mérovingienne et carolingienne (Ve-Xe s.) » sur des sépultures en coffrage de pierre sèche et sans mobilier. Les datations obtenues s’échelonnant de la fin du VIIème siècle à la fin du IXème siècle. Des datations radiocarbones complémentaires sont actuellement en cours sur les sépultures sans mobilier et pillées de la campagne de fouille 2016, qui permettront sans doute de confirmer l’extension chronologique de cet ensemble funéraire.
En ce qui concerne les pratiques funéraires observées sur les sépultures de la fouille de 2016, elles sont identiques à celles déjà observées précédemment avec notamment des aménagements des fosses sépulcrales correspondant à de très grandes fosses quadrangulaires, le plus souvent dotées de coffrages en bois, et dont l’organisation interne est dite « bipartite », ou à des fosses plus étroites, non coffrées et au sein desquelles le défunt est inhumé, avec son mobilier, dans un contenant rigide. Malgré l’important pillage que le site a subi, les tombes intactes ont livré un nombre important d’objets. Les sépultures masculines, comportaient soit l’assemblage, scramasaxe/éperon, soit épée longue/scramasaxe. Plusieurs fers de lance ainsi qu’un umbo de bouclier ont également été découverts. Les sépultures féminines les plus privilégiées étaient dotées d’imposants colliers de perles, d’éléments de chausse et de dépôts alimentaires. Au sein des tombes, le mobilier était soit déposé, généralement dans la moitié sud de la fosse, et se composait dans ce cas d’objets usuels et d’ustensiles (vaisselle en céramique et en verre, peignes, paires de forces) ou d’éléments d’armement dans les sépultures masculines ; soit en position fonctionnelle (ou déposé sur le corps du défunt), directement dans le contenant accueillant le défunt : éléments liés à l’habillement (ceintures, éléments de chausses), à la parure (colliers de perles, boucles d’oreilles, bagues, bracelets, châtelaines accompagnées d’ustensiles et/ou de breloques) et à l’armement (épées longues, scramasaxes, couteaux, aumônières munies de petit outillage). Notons également que dans certaines tombes, notamment masculines, les matières organiques (cuir, bois et textile) au contact du métal, étaient particulièrement nombreuses et très bien préservées. Des prélèvements ont été réalisés en vue d’analyses macroscopiques et micro-stratigraphiques (réalisées par Fabienne Médard – Anatex) et biochimiques (par Armelle Charrié – LSMIS, UMR 7140).
Au sud-ouest de l’emprise, perturbée par les sépultures mérovingiennes, une petite occupation hallstattienne a été mise au jour. De faible emprise et ayant livré peu de mobilier (2,6 kg de céramique, quelques restes de faune et une fibule à double timbale et ressort bilatéral), les structures découvertes correspondent à un fossé et un alignement de trous de poteau, datés de la période du Hallstatt D3. La fouille de 2016 a permis de fournir de nouvelles données qui complètent celles déjà acquises sur l’occupation protohistorique du flanc occidentale du Britzgyberg.
Tout d’abord, les observations faites ici nous permettent de rapprocher l’occupation protohistorique d’Illfurth Hasenrain de celle d’Illfurth Buergelen mise au jour à proximité immédiate en 2005, sur la même terrasse, et datée du Hallstatt D1 au Hallstatt D3. Les structures tout comme le mobilier présentent effectivement des similitudes et les deux sites sont distants d’environ 150 m, ce qui nous permet de dire qu’il s’agit probablement d’une même occupation, d’ampleur différente mais de nature vraisemblablement comparable.
Par ailleurs, ces deux secteurs sont installés sur le flan ouest du site de hauteur fortifié du Britzgyberg, occupé lui aussi durant le Hallstatt puis abandonné à la fin du Hallstatt D3. La découverte de ces vestiges à quelques mètres en contrebas de l’éperon barré laisse penser que ces derniers avaient un lien avec le site du Britzgyberg mais, dans l’état actuel des connaissances, il est difficile de savoir lequel : est-ce une extension du site fortifié ? Un déplacement/agrandissement de l’occupation de hauteur qui s’installe sur la terrasse inférieure ? Une zone réservée aux activités artisanales et agricoles ? Une zone de passage ? En ce qui concerne Illfurth Hasenrain Buergelen, on peut imaginer que le fossé et l’alignement de trous de poteau, implantés parallèlement à la pente, ont servi à divers aménagements ponctuels de la pente (limite d’un habitat ou d’un appentis, d’une terrasse, d’une zone d’activité, etc.) ou encore qu’ils correspondent aux restes d’un aménagement d’une voie d’accès au site de hauteur.